Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
30 octobre 2023 1 30 /10 /octobre /2023 16:13

RDV 17 NOVEMBRE 2023.

 

Peut-on  distinguer une idée vraie d’une croyance ?        

Vendredi 20 octobre, nous avions abordé la question du changement- pourquoi est-ce difficile de changer ? Un retour sur le problème des conflits d’opinions (abordé le 15 septembre ) , avec des exemples de conversion instantanée- Saint Paul; Simone Weil écoutant des chants portugais -  où nous avons parlé de la notion de « caractère », des rencontres et du désir d’être aimé, à l’origine des changements, nous a finalement conduit au « problème de la croyance » : comment distinguer une idée vraie d’une croyance ?

 

C’est cette réflexion difficile que nous traiterons le 17 et je vous propose de nourrir la réflexion par cet extrait du philosophe William James, qui expose une conception pragmatique de la vérité.    (1905)

 

 

JAMES -­ La conception pragmatique de la vérité :

 


« Selon le dictionnaire, la vérité est une propriété de certaines de nos idées. Cela signifie qu'elles sont « en accord» avec la « réalité », tout comme l'erreur signifie qu'elles sont «en désaccord» avec elle. Pragmatistes et intellectualistes admettent de concert cette définition comme allant de soi. Ils ne commencent à diverger que lorsqu'on pose la question de ce qu'on entend exactement par « accord » et par « réalité » entendue comme une chose avec laquelle nos idées doivent être en accord. L'idée la plus répandue est qu'une idée vraie doit copier la réalité qu'elle représente. ….

 

 

Le pragmatisme en revanche pose sa question habituelle : « Mettons qu'une idée ou une croyance soit vraie, quelle différence concrète le fait qu'elle soit vraie apportera­t-­il à l'individu dans sa vie réelle? Comment cette vérité va-­t-­elle se réaliser ? Qu'est-­ce qui, dans l'expérience, sera différent de ce qui serait si cette croyance était fausse ? En somme, quelle est la valeur réelle de la vérité en termes
d’expérience ? »

 


Ainsi,  comme c’est souvent le cas dans la philosophie empiriste anglo-saxonne, il s’agit d’aborder la question par l’expérience ; par le « faire » : pour savoir si une idée est vrai, il faut se demander ce qu’on peut en faire ! pour réfléchir à ce critère de vérité nous devrons prendre des exemples dans  différents ordres de vérité : dans la science, les pratiques médicales, la politique, les relations privées, les informations médiatiques….  

 

A bientôt donc, pour chercher cette vérité ! Camille  

octobre 2023 Pourquoi est-ce difficile de changer ?

 

Notions impliquées  :

Je propose cette question, suggérée par André, dans le prolongement de notre réflexion sur les conflits d’opinions. Comment changer d’opinion ? de mode de vie ? changer de mode de vie peut être un acte collectif ou individuel et c’est très différent bien sur mais n’y a t- il pas un lien entre ces deux niveaux de difficultés de changement : l’individuel et le social ?

Pour nourrir cette réflexion, je propose ci-dessous un texte de Nietzsche extrait de Généalogie de la morale , publié en 1887 , traduit de l’allemand. Les notions impliquées sont :  conscience, temps, bonheur, mémoire, devoir… 

 

Nietzsche définit l’être humain comme « un animal qui a été dressé pour tenir ses promesses » L’ordre social repose sur le devoir moral qui incombe aux sujets de tenir leurs engagements et de se souvenir des contrats dans lesquels ils se sont engagés dans une période de leur existence; Mais cette conviction repose sur la grande illusion de la Conscience ou la croyance à la permanence du sujet ;

(la grande force de la pensée vitaliste de Nietzsche tient dans la déconstruction de cette illusion métaphysique : chaque personne est UN  sujet. )  C’est une illusion de croire que je reste la même personne au fil du temps malgré tous les changements de mon existence. Fort ou plutôt affaibli par cette fausse conscience, je ne peux pas du jour au lendemain dire : « non ce n’est pas moi qui ai signé ce contrat ! Car je ne suis plus le même ! ». La société nous tient par la fiction d’une seule identité. Quel serait par exemple le sens du mariage, ou de la parentalité ; de la famille ; de la propriété ; du travail ; du commerce, si l’on acceptait de comprendre ces revirements ? Pourtant,  selon Nietzsche, ces mouvements sont la vie même.  L’invention de la conscience qui oblige le sujet à reconnaitre son passé comme le sien est une maladie, « un retournement de la vie contre elle-même », au sens organique. Comment pourrais-je formuler un serment d’amour sincère, entier, si au moment même du serment je reconnaissais comme mien les serments déjà faits autrefois ? C’est pourquoi Nietzsche écrit dans le texte choisi «  . L’homme qui est incapable de s’asseoir au seuil de l’instant en oubliant tous les événements du passé…. ne saura jamais ce qu’est un bonheur »

L’oubli est habituellement défini comme une faute, un manque. Ici, le philosophe renverse le sens : l’oubli est une condition de la vie.  La mémoire au contraire, est une maladie  de la vie. Et « le véritable disciple d’ Héraclite » dont il est question dans ce texte  n’est-ce pas Nietzsche lui-même ?  Héraclite, est ce philosophe de l’Antiquité  qui affirmait « on ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve » Tout est changeant dans la vie et cela concerne la recherche de la vérité.               Il y a beaucoup à dire sur ces deux courants -Héraclite / Parménide-, qui traversent toute la philosophie et la divisent ;  Mais je m’arrête là, et je vous retrouve bientôt, pour parler de la difficulté des changements !

 

Extrait de  « La Généalogie de la morale »

 

« Dans le plus petit comme dans le plus grand bonheur, il y a quelque chose qui fait que le bonheur est un bonheur: la possibilité d’oublier, ou pour le dire en termes plus savants, la faculté de sentir les choses, aussi longtemps que dure le bonheur, en dehors de toute perspective historique. L’homme qui est incapable de s’asseoir au seuil de l’instant en oubliant tous les événements du passé, celui qui ne peut pas, sans vertige et sans peur, se dresser un instant tout debout, comme une victoire, ne saura jamais ce qu’est un bonheur et, ce qui est pire, il ne fera jamais rien pour donner du bonheur aux autres. Imaginez l’exemple extrême: un homme qui serait incapable de ne rien oublier et qui serait condamné à ne voir partout qu’un devenir; celui-là ne croirait pas à sa propre existence, il ne croirait plus en soi, il verrait tout se dissoudre en une infinité de points mouvants et finirait par se perdre dans ce torrent du devenir. Finalement, en vrai disciple d’Héraclite, il n’oserait même plus bouger un doigt. Tout action exige l’oubli, comme la vie des êtres organiques exige non seulement la lumière mais aussi l’obscurité. Un homme qui ne voudrait sentir les choses qu’historiquement serait pareil à celui qu’on forcerait à s’abstenir de sommeil ou à l’animal qui ne devrait vivre que de ruminer et de ruminer sans fin. Donc, il est possible de vivre presque sans souvenir et de vivre heureux, comme le démontre l’animal, mais il est encore impossible de vivre sans oubli. Ou plus simplement encore, il y a un degré d’insomnie, de rumination, de sens, historique qui nuit au vivant et qui finit par le détruire, qu’il s’agisse d’un homme, d’une peuple ou d’une civilisation » Nietzsche

Partager cet article
Repost0

commentaires